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INTERVIEW

ROIS ET REINE

Arnaud Desplechin, aime à échanger sur le contenu de son film. Nous avons eu la chance de le rencontrer, dans un salon de l’hôtel Boscolo, en compagnie d’une de ses actrices, Magali Woch (le rôle d’Arielle – la chinoise), pour échanger sur ses Rois et sa reine.

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© Bac films

Arnaud Desplechin, aime à échanger sur le contenu de son film. Nous avons eu la chance de le rencontrer, dans un salon de l’hôtel Boscolo, en compagnie d’une de ses actrices, Magali Woch (le rôle d’Arielle – la chinoise), pour échanger sur ses Rois et sa reine.

Le réalisateur aime que ses films soient bourrés d’éléments, comme foisonnant d’énergie, de joie ou de démence. Cela ne veut pas dire que c’Le réalisateur aime que ses films soient bourrés d’éléments, comme foisonnant d’énergie, de joie ou de démence. Cela ne veut pas dire que c’est une œuvre qui lui paraît assez rapide, car ce n’est jamais assez rapide. Le personnage de Mathieu en fait toujours trop, pour séduire. C’est un mousquetaire, il va jusqu’à porter une cape. Le film se devait d’être également « trop », car la tendresse ça n’est pas assez pour remplir une vie.

Quand on le taxe de naturaliste, il indique simplement qu’il part des personnages pour construire son récit. Dans son film, Ismaël (Mathieu Amalric) se plaint préventivement, même quand il n’a pas mal. L’acteur a une diction très distincte de celle de Emmanuelle Devos. Il force certains mots, ajoute des « ah », des « oh ». Nora (Emmanuelle Devos), elle, assume ses responsabilités. Elle a pris des claques dans sa vie (le suicide du mari…), mais elle est finalement aimée par tout le monde. A la fin du film, elle n’a plus besoin de se définir par rapport aux hommes, comme le font beaucoup de personnages de cinéma, elle existe seule. En cela, il la compare à Alice de Woody Allen, l’un des ses personnages de fiction favoris.

Emmanuelle Devos a pour lui un don rare. Par exemple, durant le tournage d’une scène, elle agissait magnifiquement, avec panache. Il lui a demandé comment cela lui était venu, pour avoir tant de justesse. Elle avait simplement lu une ligne dans le scénario : « une femme scandaleusement belle », c’était elle, alors. Son personnage a connu le pire, et sait donc l’importance de ce qui est léger. Quelque part, elle a compris que « la beauté est plus belle que la laideur, que le propre est mieux que le sale », sa morale est donc de laisser le malheur de côté.

Ismaël, lui, n’a pas d’échelle des valeurs. Il peur passer de zorro à rien, d’un quatuor à un autre ensemble, cela n’a rien de traumatisant pour lui. C’est une approche de la vie finalement très morale qui le caractérise. Les deux personnages ont au final besoin l’un de l’autre. Lui de trouver un équilibre en elle. Elle d’un petit diable dans sa vie, qui apporte de la fantaisie par rapport aux autres hommes dans sa vie. D’où les deux histoires en parallèle, qui se rejoignent avec leur ancienne liaison et l’enfant à adopter.

Le metteur en scène détaille ensuite son approche de réalisateur. Il avoue ne pas arriver à réfléchir en fragmentation de l’espace ou en technique. Quand il a réalisé La vie des morts (son premier moyen métrage), il n’était pas content d’être distingué des « interprètes », car son métier est d’interpréter une direction, un scénario. Pour lui, tout devient logique, intuitif. Il se demande simplement « de quel angle cela est enchanté ou beau » ? D’où le choix des lieux de tournage. Parfois, il reprend des bouts de prises différentes et réussies sous différents points de vue, et les monte ensemble. Il a toujours l’appétit d’explorer des points de vue. Il laisse donc beaucoup de liberté aux acteurs comme le dit la jeune interprète d’Arielle.

Sa façon de voir les films l’influence dans son approche. Il conteste le fait que le naturalisme puisse être plus « vrai » que les autres genres. Il donne pour exemple le film Fiona d’Amos Kollek, qui n’est pas plus véridique que les œuvres de Blake Edwards, concernant la prostitution. Parfois, il s’étonne que le cinéma crée lui même des genres très restreints, comme les films de super-héros, ou ceux où des couples divorcés se retrouvent, après avoir connu une immense catastrophe naturelle (Twister, Le pic de Dante, Abyss…). Lui, ne prétend pas créer un genre, mais souhaite que ce qui compte dans un film, transparaisse : émotion et sensualité.

Au fond, il se définit comme un « représentant syndical des spectateurs », et après un très bon accueil à Venise, sans aucun prix, mais sans regrets, attend avec impatience l’accueil des spectateur, qui en feront, il l’espère, « usage », au travers de gestes qu’ils peuvent reprendre dans leurs vies.

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur

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