JERICÓ
Lumineux portraits de femmes vieillissantes
Dès les premiers plans, c’est la couleur et la vie, que Catalina Mesa a choisi de mettre en avant. Ceci en montrant portes et murs chaleureux, aux coloris chatoyants, accompagnés des bruits d’une ville qui s’éveille. Mais aussi par une musique latine invitant à la joie et au dynamisme. Et dès le premier portrait, c’est aussi l’importance de la religion, dans la vie de toute une génération, qu’elle met en évidence, avec toutefois une bonne dose de second degré, la plupart des femmes croisées étant conscientes de leurs défauts, ou de ceux d’un Jésus, qui même s’il « est juste », ne semble pas trop pressé de résoudre leurs problèmes (la maladie...).
Très vite, on s’attache à la Chila, sur laquelle la réalisatrice s’attarde longuement, avec sa collection de chapelets et son humour bon vivant, encore tout émoustillé des choses du sexe et de la séduction. Le rapport avec les générations suivantes est bien sûr évoqué, dans une certaine complicité, mais les portraits qui s’enchaînent ensuite font la part belle à l’âge, à la sagesse, au recul sur soi et sur ses erreurs. Et quand la musique se fait plus calme, quelques notes suffisent à créer l’émotion, face à la pudeur d’une femme malade, ou à une autre qui parle de son fils, disparu.
Derrière cette galerie de portraits de femmes, ce sont à la fois les agissements des Farc, la mauvaise considération des femmes « trop basanées », la mort d’un mari et la perte d’une situation, qui dessinent les plaies ou les problèmes d’une nation. Mais soucieuse de garder un ton optimiste, Catalina Mesa revient toujours aux mouvements diurnes ou nocturnes de ce village, Jericó, qu’arpente tant bien que mal la Chila, avec sa canne. Signifiant la nécessité de vivre d’espoirs, elle boucle son film de manière élégante, sur le même ciel qu’au début, qui attend les unes, mais semble rendre libres les autres, à l’image de ces cerfs-volants confectionnées par les plus jeunes.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur