TEDDY BEAR
Un film pudique et mélancolique, étonnamment touchant
Dennis a beau être une montagne de muscles, il a de très gros problèmes de timidité, en particulier avec les filles. Pourtant, à 38 ans, il aimerait bien trouver enfin sa dulcinée. Alors lorsque son oncle ramène son épouse de Thaïlande, il se dit que lui aussi, il pourrait bien trouver son bonheur là-bas…
Décidément, le monde du culturisme est à la mode au cinéma. Après Roschdy Zem et son « Bodybuilder », voilà que débarque sur nos écrans un film danois sur le même thème. Mais le traitement est ici radicalement différent, Mads Matthiesen étant attaché depuis longtemps à son personnage de Denis, montagne de muscles au cœur tendre. La première fois qu’il s’est emparé de cet être sensible à la morphologie surhumaine, il était même encore étudiant en cinéma. Aujourd’hui, plus de sept ans après, il poursuit sa plongée au cœur de l’intime de cet homme à la timidité maladive. Car l’éphèbe a beau avoir des muscles à faire pâlir Schwarzenegger et Stallone réunis, il est incapable d’avoir une relation avec une femme, complexe d’Œdipe en cause.
Mais à défaut de nous offrir un panorama testostéroné de ces athlètes hors-du-commun, le cinéaste a opté pour le portrait pudique de l’homme derrière les muscles, bien loin de la sueur des salles de sport. Mutique et introverti, on découvre alors un personnage à l’opposé de nos a-priori : à fleur de peau, comme si sa sensibilité s’était développée en même temps que son physique. Avec un talent d’orfèvre, Mads Matthiesen dessine alors la relation complexe entre ce grand enfant de 38 ans et sa mère, chez qui il réside toujours. Entre eux, l’amour est omniprésent et oppressant, aussi pur que malsain. Et c’est dans un élan désespéré que le protagoniste va se retrouver en Thaïlande à la recherche d’une relation sincère au milieu des prostituées. Rien ne sera jamais plus pareil pour lui.
Si le film est si émouvant, c’est avant tout grâce à la prestation toute en retenue de Kim Kold. Débordant de charisme, le comédien dégage une aura impressionnante, son regard et ses expressions faisant bien plus de dégâts que ses muscles. Mais la performance est également sublimée par une mise en scène lyrique et efficace, qui préfère l’authenticité aux artifices. Décors minimalistes, souci du réalisme, montage chirurgical et traitement documentaire sont ainsi les outils utilisés par le réalisateur pour développer un récit initiatique poignant. Car plus qu’un simple voyage à l’autre bout du monde, il s’agit de l’émancipation d’un homme trop longtemps étouffé par un amour maternel. Et au lieu de juger ses personnages, le cinéaste les présente de la plus belle des manières : sobrement et simplement. La sincérité n’en ressort que renforcée, l’émotion bien plus palpable, et la réussite du film, incontestable.
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur