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LES INITIÉS

Un film de John Trengove

Un film tribal percutant

Xolani, un ouvrier solitaire parti travailler en ville, revient à son village, dans les montagnes du Cap Oriental, pour participer avec sa communauté aux cérémonies rituelles d’initiation de plusieurs adolescents. Chacun des « gardiens » prend en charge un petit groupe de jeunes gens, les emmenant dans des campements isolés pour être circoncis et devenir des hommes. Comme chaque année, il retrouve un de ses amis, gardien également, dont la proximité le perturbe...

Présenté en ouverture du 38e Panorama du Festival de Berlin 2017, le film Sud Africain "Les initiés" suit un rituel tribal voulant que les enfants passent à l'âge adulte lors d'un cérémonial de circoncision (la "blessure" du titre, ayant également en réalité un double sens) durant près de deux semaines. A la fois percutant de part sa mise en scène près des corps et de la nature, et par sa manière d'aborder l'attirance entre hommes, dont toute l'éducation refuse la possibilité même de l'homosexualité, le film pose la question du regard extérieur sur une tradition bien ancrée.

Considéré comme tabou, le rite d'initiation traditionnel représenté ici, l'ukwaluka, pratiqué par les Xhosa en Afrique du Sud, deux fois par an, a notamment été décrit par Nelson Mandela dans son autobiographie Un long chemin vers la liberté. Adapté du roman « A Man Who is Not a Man de Thando Mgqolozana, qui est aussi co-scénariste du film, "Les initiés" met aussi en évidence la différence entre monde rural et citadin, au travers du personnage d’un jeune homme efféminé, représentant à la fois une liberté et la vision d’une perversion d’une manière traditionnelle de vivre.

Porté par un trio de jeunes acteurs impressionnants de prestance, pour la plupart amateurs et originaire de la tribu concernée par le rituel, le film parvient à bouleverser avec très peu d'effets. Scrutant les regards figés de peur, emprunts de mépris ou de fausse indifférence, voire porteurs d'espoir, John Trengove use aussi à merveille des contre-jours pour donner à voir les moments où le contact physique se fait, fusionnant les silhouettes, malgré la réprobation sociale. Cruel et frontal, il n'hésite pas à suggérer la souffrance physique, comme la sensation de n'avoir pas droit à l'amour. Un regard sensible et sans jugement sur une tradition ancestrale et l’incapacité à s’extirper d’un monde sans se retrouver seul et déraciné.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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