CITY SHARKS
Bons sentiments, obstacles à la chaîne et gags en série…
Tous les ingrédients de la comédie sont là, et dès le début du film, le réalisateur Esan Sivalingam abat ses cartes : il n’a pas pour projet de révolutionner le genre, qu’on se le dise. Et pourtant…aussi grosses que soient les ficelles, la mayonnaise prend, et à merveille ! Sivalingam joue à la perfection du comique de situation, de la naïveté sympathique de ses personnages et il nous offre 1H30 de franche rigolade, tout en introduisant une donnée pas si évidente dans bon nombres de comédies actuelles : la subtilité. Point de vulgarité facile ni de surenchère : les scènes comiques s’enchaînent à un rythme très bien maîtrisé, soutenu par une B.O efficace, et se suffisent finalement à elles-mêmes.
Les acteurs donnent juste ce qu’il faut d’humanité et de légèreté à leurs personnages pour nous les rendre attachants, ni plus ni moins, et les trois gaillards dont nous suivons le périple peuvent nous rappeler tour à tour un voisin, un frère ou un ami. La filiation, la perte des repères à l’entrée dans l’âge adulte et la difficulté des relations humaines sont évoquées en filigrane, de manière suffisamment bien dosée pour ne pas alourdir inutilement le scénario. Même le personnage secondaire de la petite amie de Mike, qui aurait pu facilement tomber dans la caricature de la fille « trop bien pour lui », offre des nuances intéressantes et apporte une touche féminine très fraîche, à 1000 lieues de la niaiserie habituelle.
Enfin, et c’est suffisamment rare pour être souligné, la réalisation est remarquablement stylisée pour un film comique : à travers de nombreux plans, perce un évident souci d’originalité et de précision, tant dans les jeux de lumière que dans les cadrages. Il faut dire que la Malaisie constitue un décor particulièrement avantageux, et le film City Sharks, en plus de nous faire rire, nous fait voyager dans des paysages que peu d’entre nous ont la chance de connaître. Réalisé avec un petit budget, ce road movie original livre de belles promesses au cinéma singapourien.
Delphine MuhlbacherEnvoyer un message au rédacteur