LES RUNAWAYS
I love Rock n'roll !
La biographie musicale est un exercice plutôt difficile, qui demande une certaine connaissance et un respect du sujet abordé. On y trouve des grands films classiques ("Bird" de Clint Eastwood, "Walk the Line" de James Mangold), des fresques historiques enlevées ("Amadeus" de Milos Forman, "Ludwig van B. " de Bernard Rose) ou de très relatifs ratages ("Ray" de Taylor Hackford, "Nowhere Boy"). Pour sa première réalisation, la photographe Floria Sigismondi choisit de prendre le problème d’une autre manière. Peut-être la plus adaptée au projet.
Plus qu’une biographie de la rockeuse Joan Jett (excellente Kristen Stewart, toute en désinvolture et rébellion), "les Runaways" s’intéresse à la création du premier groupe de la jeune femme et à son amitié tumultueuse avec la chanteuse Cherie Currie (excellente Dakota Fanning, incandescente et fragile). De leur rencontre fortuite, sous l’égide du producteur glam Kim Fowley, à l’explosion en plein succès, en passant par leur tournée triomphale au Japon, le film retrace les trois ans de vie du groupe de rock féminin, ses problèmes internes, ses ivresses.
Épaulée par des comédiens épatants (on y retrouve aussi le magistral Michael Shannon et la charmante Scout Taylor-Compton) et par un scénario ingénieux, parce que jamais condescendant ou hagiographique, Floria Sigismondi peut se permettre toutes les audaces formelles. Et c’est bien tout à son honneur d’avoir choisi le surdoué Benoît Debie pour assurer la photographie. Le chef opérateur de Gaspar Noé et Fabrice Du Welz fait ici de nouveau des merveilles. Ses recherches chromatiques, ses mouvements de caméra, ses cadrages virtuoses, tous participent du rendu palpable des émotions des actrices, leur excitation, leurs doutes, dans un maelstrom d’images et de sensations proprement vertigineux.
Magnifique reconstitution d’une époque fantasmée et fantasmante, film de rock profondément féminin, portrait de personnages forts, "les Runaways" impose le talent de sa réalisatrice, dont on attend désormais le prochain film avec une grande impatience.
Frederic WullschlegerEnvoyer un message au rédacteur