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MONSIEUR LAZHAR

Un film de Philippe Falardeau

Un deuil commun

Dans une classe de primaire au Québec, une institutrice met fin à ses jours, laissant ses élèves sans professeur pour le reste de l’année. Face à cet imprévu, la directrice de l’école convient d’embaucher un certain Bachir Lazhar, venu se présenter pour le poste. Pédagogue et attachant, personne ne se doute que Bachir, en attente de papiers, peut se faire expulser du pays à tout moment…

Adapté de la pièce de théâtre « Bashir Lazhar » d’Evelyne de la Chenelière, « Monsieur Lazhar » est le quatrième long métrage de Philippe Falardeau, après « C’est pas moi, je le jure », sorti en 2008. Ici, les enfants sont mis en scène dans leur école primaire, lieu de vie récemment frappé par la mort de leur professeur. Et c'est face à une classe en deuil que l'immigré algérien Bachir Lazhar vient enseigner, lui-même concerné par cette épreuve.

Tout au long du récit, Philippe Falardeau évoque la situation illégale de Bachir, en attente de papiers pour résider officiellement au Canada. Même si l'on revient à plusieurs reprises vers cet enjeu de l'immigration et le statut de réfugié de Bachir, le cœur même du film n'est pas là. Ce que l'on retient, c'est le questionnement récurrent au sujet du deuil, de la mort et finalement de la vie. Au fur et à mesure que Bachir découvre sa classe, on découvre les traces laissées par le suicide de cette femme dans la vie des uns et des autres. Et parallèlement, Bachir fait face à son propre deuil, celui de sa famille disparue peu de temps avant dans de tragiques circonstances. C'est cette double guérison qui est vraiment intéressante.

Ce que l'on reprochera au film, c'est peut-être la tendance un peu trop didactique des scènes et des propos, dû en partie à la pédagogie du personnage de Bachir. Ce côté enfantin ou le caractère explicatif des dialogues peut certes agacer, mais permet aussi de traiter avec délicatesse un sujet fort, bien souvent tabou. Cette question de la négation des faits est aussi clairement abordée. Le réalisateur n'hésite pas à dénoncer la politique d'autruche bien trop souvent utilisée en institution, comme ici en milieu scolaire par exemple. Bachir Lazhar vient ébranler ce jeu du tout-va-bien-on-n'en-parle-plus, et s'attaque de front aux problèmes de fond.

La langue française est aussi mise en valeur. Dans les propos de Bachir, il y a cet amour de la langue, de la grammaire et l'on ne peut s'empêcher non seulement d'y goûter avec plaisir, mais aussi de repartir avec l'envie de lire ou d'écrire. Sans aller jusqu'à militer pour le statut de la langue française au Québec, Philippe Falardeau sème toutefois avec soin quelques petits cailloux ici et là dans nos mémoires, histoire de nous rappeler que nous parlons Le Français.

Pour Philippe Farladeau, le problème d'un film avec des enfants, c'est qu'il est souvent considéré comme un film pour enfant. Nous souhaitons le rassurer sur ce point : en tant qu'adulte, on a tout pour se sentir concerné.

Anne-Claire JaulinEnvoyer un message au rédacteur

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