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MANUEL DE LIBÉRATION

Une immense souffrance et une lueur d'espoir

En Sibérie, Yulia et Katia résident dans un internat neuropsychiatrique, après être chacune passée par un orphelinat. Là-bas, elles sont déchues de l'ensemble de leurs droits civiques. L'État Russe leur refuse ainsi la liberté de mouvements, le droit d'avoir un travail ou de fonder une famille. Chacune leur elles vont tenter de retrouver leurs droits...

Récit d'une certaine impuissance face à une machine étatique des plus statiques, "Manuel de libération" est un documentaire militant qui mue peu à peu en usine à espoir, ceci malgré un ton toujours désenchanté. Il faut dire que les premières images de cet internat, filmées caméra à l'épaule, laissent entrevoir la réalité de ces femmes, conscientes de leur situation d'autant plus solitaire qu'elles sont internées au milieu de véritables déficients mentaux, alors que leur trajet fut tout différent.

Se dessine alors l'espoir et le mutisme résigné de Yulia, orpheline de 34 ans, obligée de découvrir au tribunal l'effrayant avis d'expert qui la qualifie, et la rage de vie de Katia, dont la rancoeur envers une mère qu'elle a connu ne diminue pas, et qui se rêve dans les traces de son aînée. Ne quittant jamais ses protagonistes, la caméra d'Alexander Kuznetsov ("Territoire de la liberté") filme les réactions de ces deux femmes à l'entrain muselé, mettant à distance à la fois les personnes qui les interrogent, comme les juges symboles d'une justice d'une rigidité angoissante.

Dévoilant peu à peu l'absurdité de certains tests ou expertises psychiatriques, d'approche bien peu graduelles, "Manuel de libération" se pose en révélateur d'une intelligence que la situation étouffe forcément. Captant les sourires en coin, les petites joies qui montre la conscience d'une progression vers un objectif, c'est à la fois la bienveillance du personnel, comme l'espoir d'une vie meilleure qui se dégagent peu à peu de ce film à l'amertume non dissimulée.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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