ÉPERDUMENT
Embarrassant
À la base de cette intrigue, il y a une histoire bien réelle, terrible et trouble à la fois : celle du directeur de prison Florent Gonçalves qui, pris d’une passion amoureuse pour une femme potentiellement manipulatrice (celle-ci avait à l’époque servi d’appât dans l’enlèvement d’Ilan Halimi), précipita ainsi la chute de sa carrière, par amour autant que par immaturité. Cette passion difficile est visiblement tout ce qui a intéressé Pierre Godeau, puisque la réalité violente qui entoura ce fait divers est ici purement ignorée. Si l’on cherche donc à se raccrocher à quelque chose pour aborder clairement ce film, il faudra donc chercher du côté de la romance adultère – probablement le plus éculé des sujets de société et de cinéma. Pour faire simple, nous avons l’homme aveuglé par l’amour et la femme manipulatrice des sentiments : autant dire que l’originalité du propos ne va pas voler bien haut…
La surprise du film – et paradoxalement sa seule porte de sortie – vient du fait qu’il provoque souvent un rire embarrassé. Déjà parce que ce méli-mélo carcéral télescope à peu près tout ce qui passe par la tête de Godeau pour combler les trous d’un script faiblard : citons pêle-mêle les bouquins de Racine, les films au sujet équivalent (signés Amalric, Audiard ou Brisseau : on vous laisse deviner les titres) et même l’émission de télé-réalité Secret Story ! Ensuite parce que les deux acteurs, aussi fiévreux et habités soient-ils par leurs rôles respectifs, ne parviennent jamais à former un couple de cinéma clairement cohérent : Adèle Exarchopoulos tente de nous faire passer au forceps l’idée qu’elle a la sensualité à fleur de peau (ce qui, depuis "La Vie d’Adèle", n’est plus à démontrer…) tandis que Guillaume Gallienne, ici dans un rôle on ne peut plus sérieux, nous laisse malheureusement croire que la comédie et la fantaisie sont infiniment mieux à sa taille. Leurs scènes d’ébats sexuels payent le prix de ce manque d’homogénéité : on devrait ressentir la fièvre amoureuse, mais on a surtout envie de rigoler devant ce qui frise la pantalonnade involontaire. Il y a comme un problème dans l’équation…
Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur