LOSE YOUR HEAD
Sous-produit
"Lose Your Head" est un de ces films malheureusement sélectionnés à Berlin, non pour leur réelle qualité de mise en scène ou de jeu (le jeune acteur espagnol semble avoir ici une palette d’émotions bien limitée...), mais parce qu’il faut disposer d’un quota de films aux thématiques LGBT, pour fournir un large terreau aux Teddy Awards. Si les prix en question ne déméritent jamais, trouvant au final quelques pépites à récompenser (l’an dernier "Absent" côté fictions et cette année le "Bambi" de Sebastien Lifshitz côté documentaires), le jury a souvent affaire à de nombreux longs-métrages qui n’ont pas vraiment leur place dans un Festival de premier plan comme Berlin.
Retenu dans la section Panorama 2013, ce film gay allemand nous invite à suivre un jeune espagnol un peu perdu (ses histoires de couple au pays sont évoquées par petites touches), entre fêtes et lieux alternatifs d’un Berlin que les réalisateurs tentent de décrire comme le lieu de toutes les libertés et de tous les excès. Superposant à la trame passionnelle (la peu compréhensible attraction exercée par un homme plus âgée, dont la folie serait plus inquiétante qu’attirante...) une sombre histoire de disparition d’un jeune roumain (ex-amant de l’homme en question...), le scénario tente en vain d’insuffler au métrage une atmosphère de danger qui ne vient jamais.
Développant à peine ses multiples personnages (le jeune espagnol s’accoquine avec la sœur du disparu et son ami...), ce voyage étouffant au pays du fantasme de la domination / soumission, aligne clichés et situations invraisemblables ou exagérée (la réaction face à une photo de photomaton...), tout en délivrant quelques vérités sur l’ambiance berlinoise (le développement d’un « racisme » envers les Espagnols, considérés comme des immigrés envahissants depuis le début de la crise, qui les oblige à s’expatrier notamment vers l’Allemagne...).
Au final, si l’on passe outre le charisme niveau zéro de l’acteur allemand (Marko Mandic, vu également dans "Gold"), "Lose Your Head" se complaît dans la description d’une vision toute germanique et protestante de la sexualité, forcément liée à la douleur et à la punition, à mille lieux de la joie et la liberté débridée portée par un pays du sud comme l’Espagne et sa Movida. Si la nécessité du personnage de céder à ses démons, et de se perdre au travers d’un « autre » semble compréhensible, fallait-il nécessairement que ce soit au profit d’un blond dominateur mal peigné qui vous nie toute autonomie ? D’autant que les auteurs ne semblent avoir aucun discours sur l’infantilisation et les rites de passage à l’âge adulte, que semble adopter leur jeune « héros ».
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur