EXTRÊMEMENT FORT ET INCROYABLEMENT PRÈS
CONTRE: Niveau 0 – L'impasse psychologique
Le nouveau film de Stephen Daldry démarre à hauteur d'enfant pour tenter de terminer à hauteur d'homme. Ambitieux sur le fond, basé sur une déchirante histoire de deuil refusé, « Extrêmement fort et incroyablement près » s'ouvre sur quelques scènes de complicité parfois attendrissantes (avec la grand-mère, joignable par talkie-walkie dans l'immeuble d'en face, qui se laisse gentiment embarquer dans les fantasmes du petit... ), parfois trop appuyées (avec le père complice...), pour se transformer par la suite en une « chasse au trésor » un rien stérile, qui accumule malheureusement les coïncidences faciles.
Révélé à la Quinzaine des réalisateurs avec la passion contrariée d'un jeune garçon pour la danse dans « Billy Elliott », confirmé par le complexe « The Hours » ayant valu un Oscar à Nicole Kidman pour sa sidérante interprétation de Virginia Woolf, Stephen Daldry s'était déjà partiellement égaré dans son traitement dramatique de « The Reader », il y a trois ans. Le voici qui verse dans le cliché sur les relations père-fils, insistant lourdement sur l'aspect précoce mais socialement isolé du héros, tout en rendant agaçant le personnage du père, Tom Hanks étant affublé de certains tics (haussements d'épaules exagérés, grimaces inutiles...), histoire de mieux forcer l'émotion dans la suite du film.
Car une fois que le drame s'est produit, en ce fameux « jour le pire », c'est bien pour ne pas rompre ce dernier lien ténu qui l'unit encore à son père, que le jeune garçon va courir après la serrure adaptée à la clef qu'il a par hasard trouvée. Persuadé, certainement à tort, qu'il s'agit là d'un message de son défunt père, sa quête au travers d'un New York bigarré lui permettra de rencontrer nombre de gens, lui qui a tant de mal à rentrer en contact avec « l'autre ». Le parallèle avec les jeux que lui inventait un père attentif et inventif est certes charmant, mais la quête se transformera bien vite en un parcours répétitif, relevant plus du catalogue de bonnes volontés que de vraies rencontres.
D'autant que se mêle à l'histoire un vieillard muet (Max Von Sydow), prétendu propriétaire de l'appartement où vit la grand-mère, dont les agissements plus ou moins secrets ne sont quasiment pas explicités. Adapté du roman de Jonathan Safran Foer, « Extrêmement fort et incroyablement près » paru en 2007, ce film fait finalement l'impasse sur les réelles perturbations psychologiques de l'enfant, tout comme sur l'histoire secrète qui unit la grand-mère et ce fameux « vieil homme ». Trop de coïncidences faciles et trop de bons sentiments ont donc finalement raison d'un récit pourtant plaisant, qui n'est pas sans dégager quelques moments de pure émotion, notamment dans sa première demi-heure.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur