COMPUTER CHESS
Un week-end des plus drôles et burlesques au pays des intellos
Sous ses faux-airs de documentaire, "Computer Chess" et son style rétro assumé, avec son noir et blanc lumineux et sa caméra d’antan, constituent une œuvre atypique et originale nous plongeant au cœur des années 80. On découvre alors une bande de nerds, grosses lunettes et chemise dans le pantalon, titiller leur moustache durant des parties d’échecs un peu particulières, celles-ci voyant des ordinateurs s’affronter. Le métrage se focalise sur une convention destinée à récompenser le meilleur logiciel d’échecs dans l’optique qu’un jour, l’homme puisse être battu par une machine. Si la plus grande force du film est ce pitch innovant, la reconstitution des eighties est également réussie, le réalisateur parvenant parfaitement à capturer cette époque où les ordinateurs étaient encore d’énormes machines et où le cerveau de l’homme était bien plus valorisé que les circuits imprimés des unités centrales.
Mais au lieu de se contenter de nous transporter dans cette atmosphère insolite, Andrew Bujalski s’amuse à nous offrir un défilé de personnalités loufoques, donnant lieu à de nombreuses situations des plus cocasses. Afin de casser la redondance des parties d’échecs, le metteur en scène a intelligemment développé la psychologie de chacun de ses protagonistes, le jeu ne devenant plus qu’un interlude entre toutes les cocasseries auxquelles le spectateur assiste. Et le film réussit plusieurs coups d’éclats, parvenant à disséminer des running gags des plus efficaces tout au long de l’intrigue, comme ce programmeur qui essaye de squatter toutes les chambres pour finir par dormir n’importe où.
Comique et plaisant, le film refuse toutefois le pur divertissement et se sert de l’intellect de ses personnages pour conduire l’ensemble vers des sentiers philosophies où des réflexions sur la connaissance, le savoir-humain, le devenir de l’homme ou encore la place des machines dans une société agrémentent les discussions. Aussi caustique qu’intello, "Computer Chess" souffre néanmoins de ce qui est également son atout majeur : son synopsis. Car malgré tout le talent du réalisateur-scénariste, les échecs restent les échecs, et l’ennui finit progressivement par nous gagner, malgré les velléités de Bujalski de transcender son récit.
Même si le rythme s’essouffle, il faut bien reconnaître que réaliser un film qui ne soit pas complètement barbant sur ce jeu ancestral paraissait mission impossible. Et pourtant, le cinéaste américain s’en sort haut la main, osant même différents effets de style et trouvailles visuelles qui viennent renforcer notre bonne impression quant à cet ovni cinématographique. Plus qu’à se mettre aux échecs !
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur