CLEVELAND CONTRE WALL STREET
De bonnes intentions en perte de crédibilité
La Quinzaine des réalisateurs 2010 faisait la part belle à un genre en vogue: le documentaire. D'autant que les productions récentes, entre malbouffe, réchauffement climatique et crise financière, ont actuellement pas mal de grain à moudre. Malheureusement, tenir un bon sujet et disposer de personnages ou personnes réelles aux meilleures intentions, ne signifie pas nécessairement parvenir à réussir un bon film. "Cleveland contre Wall street" en est la preuve évidente, donnant une place à de véritables témoignages, au cours d'un faux procès, organisé comme un vrai.
Un peu sur le même principe que "Bamako", ce pseudo-documentaire bourré de bonnes intentions s'avère malheureusement bien manichéen, se contentant de concentrer une bonne partie des débats sur des argumentaires purement humains et subjectifs, au travers de témoignages de policiers, de victimes d'expulsion et de leurs enfants, forcément incrédules face à des évènements qui les dépassent. Si la dissection des mécanismes financiers inventés pour vider les poches des épargnants est plutôt efficace, on est un peu agacé qu'on nous force la main en terme d'empathie avec les témoins, car on ne peut qu'être d'accord avec l'indignation collective en cours de manifestation sous nos yeux.
Le premier plan, de Cleveland sous la neige, montre une silhouette d'individu, comme écrasé par le poids des institutions ou d'un système. David va donc combattre Goliath, et l'on s'en réjouit. Mais le documentaire s'avère tout de même rapidement contre productif, mettant le doigt d'un coté sur l'incapacité des américains à penser autrement qu'en terme d'endettement, d'autre part sur la faiblesse de citoyens qui restent dans le domaine de l'émotion, sans parvenir à s'organiser à la manière de leurs adversaires. On aurait aimé trouver ici autre chose qu'un étalage de réactions naïves face au système, au travers par exemple d'idées combatives et nouvelles, ou d'arguments percutants. Le résultat déçoit, mais incite tout de même au combat. C'est au moins cela, et finalement peu importe le verdict. C'est l'avenir qui jugera.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur