D'APRÈS UNE HISTOIRE VRAIE
CONTRE : Niveau : -1 - Les bons romans ne font pas nécessairement des bons films…
Delphine, auteure d’un best-seller polémique consacré à sa mère, ne parvient pas à se mettre à l’écriture de son nouveau livre. Faisant la connaissance de Elle, une jeune admiratrice aussi séduisante qu’intelligente, elle va peu à peu s’attacher à elle, leur amitié prenant une tournure inquiétante lorsque celle-ci vient s’installer chez la romancière…
Pour son nouveau passage au Festival de Cannes, Roman Polanski avait décidé de revenir à l’essence même de son cinéma, l’exploration des névroses féminines dans une forme dont il est devenu roi, le thriller psychologique. Adaptation du roman du même nom de Delphine de Vigan, prix Renaudot en 2015, sur un scénario d’Olivier Assayas, "D’après une histoire vraie" raconte le parcours d’une écrivaine pour retrouver l’inspiration après un premier best-seller introspectif particulièrement douloureux. Alors que la page demeure tristement blanche, la romancière va faire la rencontre d’Elle, une jeune femme avec qui elle noue une relation troublante. Mais l’excitation et la fascination des débuts laissent place à un jeu de manipulation malsain.
Avec un tel postulat de départ, le film disposait de toutes les qualités pour permettre au cinéaste franco-polonais d’exprimer toute sa maestria, cette propension à installer le malaise avec très peu d’effets, à capturer les troubles de ses congénères et la folie d’une époque. Malheureusement, dès les premières minutes, un navrant constat s’impose : le métrage ne sera jamais le grand thriller anxiogène rêvé, mais une vulgaire série B à la dramaturgie ridicule et sans aucune direction d’acteurs. Car le premier problème vient bien de la performance des comédiens, en particulier Eva Green avec sa diction volontairement hachurée et son jeu outrancier. La bande son bâclée, le scénario insipide et les rebondissements prévisibles témoignent d’une œuvre qui ne trouve jamais son rythme et son équilibre.
Se prenant bien trop au sérieux pour développer un quelconque second degré, la farce satyrique attriste par son résultat plus qu’elle ne fait sourire. Pire, le réalisateur semble lui-même à la dérive, hésitant entre une approche naturaliste (ces plans en extérieur peu esthétiques) et une atmosphère surréaliste (que ce soit volontaire ou dû aux maladresses de l’ensemble). Jamais oppressant, "D’après une histoire vraie" s’enfonce dans un entre-deux fade où la noirceur du récit ne rencontre aucun écho et où la réflexion sur la création ne dépasse pas le niveau de la conversation de comptoir. Si la protagoniste Delphine souffre d’un manque d’inspiration, il n’est rien par rapport à celui de Roman Polanski…
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur