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HISTORIA DEL MIEDO

Un film de Benjamin Naishtat

Une expérience poussive

Un hélicoptère passe, des bruits d'alarme retentissent, des montagnes d’immondices sont brûlés. D'un côté chez les riches, la demande de sécurité est de plus en plus grande. De l'autre, une femme de ménage et son fils voudraient bien vivre mieux...

Film argentin mettant le doigt sur les différences grandissantes entre classes aisées et parties les plus pauvres de la population, cette "Historia del miedo" (« histoire de la peur », en français) tente de nous plonger dans un univers de craintes réciproques entre personnes de classes sociales différentes. Un garçon qui se comporte bizarrement dans un fast food, l'apparition d'un jeune homme nu au milieu de la route, d'invisibles gamins qui jettent de la boue sur une voiture de police, tout concoure à installer un climat de crainte, le spectateur ne sachant pas très bien où se situent les repères de ce récit, comme de cette société aux inégalités flagrantes.

C'est au travers de ce qui apparaît au départ comme des tensions ordinaires, des frustrations quotidiennes, que se dessine peu à peu la paranoïa des plus riches, naturellement porteuse de peur irrationnelle. Celle-ci prend corps dans la scène centrale du film, un repas interrompu par une panne de courant, où les protagonistes comme le spectateur se retrouvent sans lumière, condamnés à aller chercher leurs enfants restés dehors.

La mise en condition semble un instant efficace, mais Benjamin Naishat n'a pas le brio de son compatriote Rodrigo Pla, dont "La Zona" traitait déjà des communautés fermées, et sa mise en scène n'a pas le caractère obsédant de celle de Juan Carlos Valdivia pour "Zona Sur", portrait d'une jeunesse dorée inconsciente de la misère qui l'entoure. La tension retombe aussi vite qu'elle était apparue, "Historia del miedo" générant au final plus d'agacement que de peur, loin de la torpeur que pouvait susciter, sur la base du même principe de plongée dans le noir, un film comme "Le Temps du loup" de Michael Haneke.

Reste qu'il pose quelques questions de cohabitation sociale intéressantes, et qu'il interroge sur le self contrôle de chacun quand sa vie peut être menacée. Comment une simple panne de courant peut-elle devenir source d'une panique incontrôlable ? Comment la paranoïa gagne-t-elle certaines couches de la population ? Comment ces populations obtiennent elles des décisions politiques qui renforcent encore plus leur isolement ? Combien de temps cela va-t-il durer sans provoquer une explosion ?

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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