ON NE DEVRAIT PAS EXISTER
Un ovni qui recèle quelques moments de pure magie
Présenté à la Quinzaine des réalisateurs 2006, « On ne devrait pas exister », film au titre explicite, faisait nécessairement office de curiosité, car réalisé par un acteur dit « porno ». Mais pour son premier film, le fameux HPG, s’est moins intéressé au milieu du X, dont il dresse un portrait rapide et tourmenté, qu’au désir ardent qui anime ceux qui souhaitent devenir acteurs, dans le sens classique du terme. Déroutant, parfois touchant, son film résonne plus comme un cri de désespoir face à un monde qui rejette avec hypocrisie les produits de ses propres pulsions, que comme un réel cri d’amour pour les acteurs de cinéma traditionnel.
Car dans ce film, chacun en prend pour son grade. Lors d’une hallucinante scène d’audition, HPG s’interroge sur le travail d’acteur et la capacité à faire passer des émotions mieux qu’une personne connaissant elle même l’état interprété. Pendant près de 20 mn, il part dans des délires estampillés « alcoolisés », fustigeant manque de dialogue et d’écoute, et discutant les rapports entre naturel et construit. Puis il rencontre plusieurs vieux de la vieille qui surjouent avec délectation. A la critique de la reconnaissance de l’expérience et de la réussite amateur, il ajoute la négation de ses origines et le formatage ambiant.
De là, jaillissent quelques troublantes vérités, comme le « tatouage » dont sont victimes les acteurs de porno, et leurs difficultés à s’extirper de leur milieu. Celles-ci ponctuent le film de quelques moments magiques, comme les discussions philosophiques avec le metteur en scène de Tiresia et Le pornographe (Bertrand Bonello) sur la nature de l’ « acteur », ou les exercices de jeu avec Marilou Berry et Rachida Brakni. Entre désir de seconde chance et revendication du droit d’exister, le film de HPG offre ainsi quelques moments d’un cinéma à part, parfois intello, parfois graveleux, qui dérange autant qu’il trouble, mais offre de vrais moments de jeu, dont les scènes de rencontre entre le réalisateur et LZA sont le meilleur témoignage.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur