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20TH CENTURY WOMEN

Un film de Mike Mills

Des fausses notes mais une vraie humanité

Santa Barbara, Californie, 1979. Dorothea Fields, 55 ans, a eu tardivement un fils, Jamie, qui a désormais 15 ans. Alors que le père est parti depuis longtemps, elle n’est pas certaine de pouvoir aider Jamie à passer le cap de l’adolescence. Elle tente un temps de lui trouver un père de substitution avec William, un ancien hippie qui loue une chambre dans leur maison. Mais c’est plutôt du côté féminin qu’elle pense trouver du soutien, avec Julie, amie d’enfance de Jamie dont ce dernier est éperdument amoureux, et Abbie, l’autre locataire de la maison, une jeune photographe punk...

Les qualités ne manquent pas (nous y viendrons plus loin) mais certains aspects peuvent décevoir. Tout d’abord, le réalisateur-scénariste Mike Mills, sans doute trop passionné par le caractère autobiographique de son film, paraît incapable de se focaliser sur tel(le) ou tel(le) protagoniste, ce non-choix le conduisant notamment à utiliser plusieurs narrateurs : deux au début, et jusqu’à cinq vers la fin ! Ceci apporte un peu de confusion au film, d’autant que le titre peut laisser penser que les personnages masculins seront secondaires, ce qui est vrai pour William mais pas pour Jamie. D’autre part, il flotte chez le spectateur ce sentiment de voir un énième film américain indépendant un peu bobo-mélancolique qui explore l’adolescence et le sens de la vie avec un faux rythme parfois plombant ! On peut aussi regretter le flashforward qui intervient dans la narration de Dorothea : autant ceux de la fin peuvent se comprendre (en mode « que deviennent les personnages après »), autant celui proposé en plein milieu du récit sonne comme un commentaire direct du réalisateur, plutôt maladroit et inapproprié.

Malgré tout, grâce à l’attachement que l’on peut aisément ressentir envers ces cinq personnages, les réticences finissent par s’estomper, et on se laisse aller dans cette chronique douce-amère dans laquelle Mike Mills ne fait preuve ni d’optimisme ni de pessimisme, donnant à voir l’instabilité ou le caractère illusoire du bonheur – surtout si on s’en préoccupe trop ! Posant plus de questions qu’il n’apporte de réponses (donc pas trop de moralisme lourdingue !), Mills parvient à rendre compte de la complexité des rapports humains, démontant par exemple certains clichés comme celui qui voudrait que les vieux sont toujours plus mûrs et lucides que les jeunes et que ces derniers bénéficient forcément de l’expérience des premiers.

Outre la distribution sans couac qu’il convient de saluer (Annette Bening trouvant ici l’un des plus beaux rôles de sa carrière), le film est au moins une réussite sur deux points. D’abord, « 20th Century Women » propose une remarquable reconstitution de l’Amérique de la fin des années 1970, avec l’insertion d’images d’archive, des références à une culture punk suffisamment mise à distance (pas de réalisation punk donc, mais un mélange de respect et de dérision envers ce mouvement) ou encore des citations d’ouvrages littéraires. Ensuite, le film est plutôt efficace sur le discours féministe, ni trop appuyé ni trop contenu. Cet aspect offre sans doute au film certaines de ses meilleures scènes (du moins les plus originales), comme celle où le jeune Jamie se fait casser la figure pour avoir suggéré subtilement à un autre ado qu’il n’a très probablement pas fait jouir sa copine, ou celle dans laquelle Abbie fait répéter le mot « menstruations » à toute une tablée d’amis pour prouver qu’il n’y a pas de raison objective que ce sujet soit gênant ! S’il y avait une seule leçon à tirer de ce film, c’est l’impact que les lectures et les fréquentations peuvent avoir sur la construction personnelle d’un jeune garçon, ce que résume cette réplique de Jamie : « Peut-être que je suis féministe ! »

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

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