LA DAME DANS L’AUTO AVEC DES LUNETTES ET UN FUSIL
Élégant, raffiné… et c’est malheureusement tout !
Une image veloutée soulignée par les plus grands standards de la Soul, des plans construits en mosaïque, des mini-jupes élégantes révélant des jambes télescopiques perchées sur des plateform shoes… Rien n’est laissé au hasard pour que cette dame dans une auto avec des lunettes et un fusil évoque magnifiquement une ambiance seventies des plus raffinées. Loin d’être une copie parodique d’un style qui a marié nos parents, le cinéma de Yoann Sfar sublime avec volupté l’insouciance d’une époque qui ne connaît pas encore la crise. De l’homme d’affaire charismatique à la secrétaire sexy en passant par le séducteur italien impeccable dans son costume trois pièces, chaque personnage dégage un potentiel vintage qui nous ferait regretter l’avènement du minitel.
Malheureusement ce bel écrin se révèle bien vite être une coquille vide. L’ambiance énigmatique des premières minutes promettant un thriller digne du grand Alfred, se distille au fil de la nationale 7 en polar de seconde zone. En effet, à trop vouloir filmer l’interminable paire de jambe de la demoiselle, Joann sfar en oublie la crédibilité de son scénario. Le film tarde à déraper dans le côté sombre et les détails troublants s’enchaînent sans transitions réellement crédibles. La jeune fille, victime d’événements pour le moins traumatisant, paraît rarement troublée par la tournure dramatique que prend son petit road trip improvisé et elle continue sa route comme si de rien était. Quant au dénouement tant attendu qui explique le pourquoi du comment d’une telle affaire, il est révélé rapido presto en parallèle de la scène finale, survolant allègrement les détails les plus bancales de cette histoire de faux semblants.
Sur le papier pourtant, « La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil » était prometteur. Adapté d’un roman de Sébastien Japrisot, le film présageait d’égaler d’autres adaptations du romancier-scénariste telle que « Compartiment tueur », « Un long dimanche de fiançailles », voire l’excellent « L’Été meurtrier » de Jean Becker. Malheureusement ici la mayonnaise ne prend pas, tant le film souffre d’une narration chaotique et d’une interprétation sans grand relief. Freya Mavor a beau avoir un physique de rêve, elle ne trouve jamais le bon ton pour incarner un personnage piégé dans une spirale infernale. Une erreur de casting qui s’avérera fatale vu que toute l’histoire repose sur son personnage. Un film qu’on oubliera vite dans la carrière du talentueux Yoann Sfar qui jusqu’à présent nous avait émerveillé avec « Gainsbourg, vie héroïque » et l’adaptation de son chef d’œuvre en bande dessinées : « Le chat du Rabbin ».
Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur