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L'ÉCONOMIE DU COUPLE

Un film de Joachim Lafosse

Marie et Boris sont dans une maison, Marie l’a achetée et Boris l’a rénovée : qui est-ce qui reste ?

Marie et Boris, parents de jumelles, sont un jeune couple qui se sépare après une quinzaine d’années de vie commune. Tous les quatre ont vécu dans une maison – achetée par elle, rénovée par lui – qui sera leur principal motif de discorde…

Ou plutôt quelle part d’argent je peux revendiquer ? Telle est la question qui animera les débats de ce couple en pleine rupture et qui fera passer les revendications pécuniaires avant le principal. Joachim Lafosse ("À perdre la raison", "Les Chevaliers blancs"…) nous plonge dans un décor minimaliste et nous enferme avec cette femme et cet homme en plein duel à « O.K. Moral ». Nous serons les témoins des débats houleux et stériles où chacun cherchera à revendiquer sa part du gâteau. Le couple entrera dans une danse funeste, une mise à mort des sentiments où l’objectif sera aussi de nuire en rabaissant l’autre, en le mettant mal à l’aise face aux enfants ou aux amis proches. Une danse qui trouvera une trêve dans une chorégraphie familiale où, réunis, parents et enfants retrouveront l’unicité qui a fait les beaux jours de cette petite famille.

Le scénario et les dialogues sont d’une finesse intense. La réalisation et la photo sont propres, efficaces, distillant habilement tensions et respirations dans cet univers carcéral étriqué (ne parle-t-on pas de cellule familiale !?). Autour du couple, ce sont trois générations qui assistent à ce déchirement, et avec elles trois façons différentes d’appréhender les débats. D’abord, les enfants – des jumelles – qui ont l’innocence avec elles. La gémellité est aussi un facteur intéressant : car représentant le « fruit » du couple quand il était en totale « fusion » et traduisant aujourd’hui une contradiction, une image du passé, tant les divergences ont pris le dessus. Ensuite les adultes, à travers leurs amis, qui sont dans une compréhension des comportements, quels que soient leurs avis d’ailleurs sur la situation. Enfin, à travers le rôle de (la brillante) Marthe Keller, la troisième génération rappelle le temps jadis des couples qui ne séparaient pas, cherchant à réparer plutôt qu’à baisser les bras.

Une justesse d’écriture et de mise en scène qui est magnifiée par les deux principaux comédiens qui portent tout le film. Bérénice Béjo trouve – enfin – un peu plus de naturel, ce qui lui manque parfois dans ses rôles de femme tourmentée. Cédric Kahn, quant à lui, loin d’être une révélation, confirme tout bonnement qu’il n’est pas qu’un – talentueux – réalisateur ("Vie sauvage", "Une vie meilleure"…) mais qu’il a sa place parmi les plus grands comédiens français avec sa gueule (et son cœur) comme un savant mélange entre Vincent Lindon et Jean Gabin. "L’Economie du couple" : un beau film dont vous ne pouvez faire l’économie.

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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