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DAMSELS IN DISTRESS

Un film de Whit Stillman

Un teen-movie à part, où la peste est une vraie gentille

Lily vient d’arriver sur le campus de Seven Oaks, où elle fait la connaissance de ses trois copines de chambrée. Un peu inquiète, elle se laisse guider par ces filles qui ont plein d’idées sur le monde, veulent « améliorer » les gens et s’occupent du Suicide Prevention Center, où on guérit les pulsions suicidaires par des leçons de tap dance…

« Damsels in distress » est un film signé Whit Stillman, réalisateur remarqué en 1999 pour « The last days of disco » et quasi absent depuis. Il n'a pas grand chose à voir avec "Demoiselle en détresse" de George Stevens avec Fred Astaire (1937), puisqu'il s'agit d'un teen movie (de qualité) qui a eu les honneurs de faire la clôture du Festival de Venise 2011, allégeant un peu la tonalité d'une édition plutôt tournée vers le drame. Sa projection fut une rafraîchissante surprise, et l'occasion de rappeler que la Mostra de Venise est toujours tournée vers l'avenir, ceci malgré ses récentes difficultés logistiques.

Son héroïne s'appelle Lily, étudiante fraîchement débarquée sur un campus, et rapidement approchée, comme dans tout film du genre qui se respecte, par une bande d'écervelées plutôt jolies, prétentieuses (elles veulent absolument aider les autres...), mais pour une fois pas si pestes. Car là où le scénario surprend, c'est au niveau des théories de ces demoiselles, pour le moins extravagantes. Ainsi, en amour il vaut mieux viser un homme pas trop beau ni intelligent et l'aider à prendre conscience de son potentiel (prenez-en de la graine !). Quant aux dépressifs cliniques, ils devraient pouvoir s'en sortir en étant soignés à coup de leçons de Tap Dance (ça ne s'invente pas!).

À la fois loufoque et pince-sans-rire, « Damsels in distress » est un plaisir de dialogues absurdes, le spectateur adoptant le même regard que l'étrangère Lily, effaré par les différentes certitudes exposées ici, l'important étant chez ces demoiselles, de ne pas perdre la face. Avec ce teen movie bavard, vous apprendrez donc beaucoup de chose. Que par exemple il existait deux Zorros, un avec un Z, l'autre avec un X, mais qu'on se souvient du premier car le second signant d'un X et non d'un Z, passait logiquement pour un illettré ! Vous apprendrez aussi que si vous avez un petit ami Cathar, il risque de vouloir vous faire l'amour par derrière pour éviter d'utiliser des préservatifs. Vous aurez droit à toutes sorties de préjugés devenus théories, vous révélant par exemple sur l'effet néfaste du sport sur les homosexuels, qui étaient par le passé raffinés et intelligents, et qu'ils ont tout perdu en devenant des musclés aux T-shirts moulants.

Vous l'aurez compris, pour peu que vous adhériez à un certain cynisme, le film pourrait bien vous causer un blocage nerveux des zygomatiques. Vous y découvrirez aussi une galerie de jeunes personnages attachants, parfois pas toujours très intelligents (l'un d'entre eux, qui s'appelle opportunément Thor, ne connaît même pas les couleurs, incapable de distinguer des yeux bleus ou un mur vert), et surtout une garce qui pour une fois est réellement et profonde généreuse, Violet. Interprétée par Greta Gerwig (« Greenberg »), elle vole clairement la vedette à celle qui d'habitude serait l'héroïne, comparant sa mission envers les autres au mythe de Sysithe, tout qualifiant celui-ci de « crétin ».

En sortant de la projection, vous ne verrez également plus les campus américains de la même manière, du Suicide Center – le panneau « Prevention » s'étant décroché du mur de manière inopinée-, aux différents bâtiments des confréries. Chapitré en lettres romaines, « Damsels in distress » est donc une comédie qui devrait amuser les ados et faire rire aux éclats les adultes. Résolument positive, elle fait tout de même quelques allusions au film de George Stevens, en dénommant le prof de Tap-Dance « Freak-Astaire » et en nous offrant un passage final chanté et dansé, avec le grand Fred Astaire. Vivement sa sortie en salles, qu'on puisse retrouver cette bande de joyeux dépressifs.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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