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MIRACLE EN ALASKA

Un film de Ken Kwapis

Plus agaçant que véritablement écolo

En 1988, un jeune journaliste basé à Anchorage se retrouve dans la ville de Barrow, au nord de l’Alaska, pour une semaine de reportages peu passionnants. Ayant fait copain-copain avec un gamin d’une tribu inuit, il accepte de filmer les soi-disant exploits de son cousin en moto-neige. C’est alors qu’il découvre trois baleines coincées dans la glace, qui tentent de maintenir un trou ouvert pour pouvoir respirer et donc survivre. Son reportage va attirer l’attention de la nation toute entière sur ce coin reculé du pays…

Film résolument tourné vers un public familial, « Miracle en Alaska » est sensé montrer la potentielle unité de la Nation américaine autour d'une cause qui le mérite, et la capacité de son peuple à aller de l'avant, sans jamais renoncer. Bien évidemment, ce qui démarrait comme une dénonciation de l'emprise des magnats du pétrole sur l'une des régions les plus riches en biodiversité se transforme petit à petit en conte pour enfant, où les pires requins montrent leur côté humain (mais provisoire), et où le mérite et le symbole facile prennent encore une fois le dessus sur toutes les autres considérations.

En résulte donc un film qui se regarde sans peine, ménageant un certain suspense quant au devenir des baleines grises surprises par les glaces, mais qui agace profondément sur le fond. Car finalement chacun a ses intérêts, jamais remis en cause, et l'individualisme roi trouve toute sa justification dans le comportement de chacun des personnages (hormis celui du journaliste de départ, seul à partager vraiment quelque chose...). Les baleines ne sont donc pas ici protégées pour leur valeur patrimoniale, en tant qu'espèce menacées, mais parce qu'elles ont droit à une deuxième chance.

Le directeur de la compagnie pétrolière y voit un beau coup de pub. Pour la garde nationale, il s'agit d'une mission de sauvetage comme une autre. Pour les politiques, il en va de la future élection de Georges Bush, histoire de donner un coup de vernis vert à la politique de Reagan. Pour les journalistes, il s'agit d'obtenir un scoop et potentiellement une promotion, voire une renommée nationale. Pour la tribu locale, il s'agit d'effacer une image de chasseurs sanguinaires. Pour les Russes, tout se résume à tendre la main à une collaboration bienvenue à cette époque. Et pour les écolos, il s'agit de prendre une revanche sur ses adversaires.

Bref, le sort de ces pauvres baleines serait tout autre si chacun n'avait pas à y gagner, d'un point de vue image, argent, carrière voire honneur. Débordant de ces bonnes valeurs américaines qui visent à faire passer les militants écolos pour des caractériels qui ne tiennent pas en compte les enjeux économiques ou culturels locaux, ou à lier le droit d'exister à un mérite que l'on doit gagner, « Miracle en Alaska » pourrait bien faire mordre à l'hameçon les plus jeunes, mais ne restera pas dans les anales du cinéma militant.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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