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JOURS DE FRANCE

Un film de Jérôme Reybaud

Un humour réjouissant pour un road-movie décalé

Pierre décide de tout plaquer et de partir sur les routes de France avec sa voiture. Il se laisse guider par le hasard des rencontres homosexuelles qui se présente, faites par le biais d'une appli sur internet, ou sur des lieux de drague. Paul, son ami, n'ayant aucune nouvelle, décide de se rendre au centre de la France pour le géolocaliser via son appli préférée Grindr, en se disant qu'il finira bien par passer dans un certain rayon autour de lui...

Avec l'histoire d'un jeune homosexuel décidé à couper tout lien et à se laisser porter par la route et les rencontres, "Jours de France" livre un portrait décalé et réjouissant d'une France rurale bien vivante, vue à travers le prisme des lieux de drague homos, des applications type Grindr (équivalent gay de Tinder) et des rencontres les plus sympathiques ou improbables que cela peut amener. Avec un humour réjouissant et un état d'esprit positif, le scénario de Jérôme Reybaud aligne donc des personnages croquignolets à la répartie presque hors normes, tout en approchant la recherche d'une sorte d'équilibre existentiel.

Faisant forcément penser, dans ses influences cyniques et ses personnages décalés, au cinéma récent d'Alain Guiraudie (le film n'est pas sans évoquer certains aspects de "L'Inconnu du lac"), le scénario met en avant les personnages et leurs réactions, ne déployant aucun jugement sur leurs comportements. Le film installe ainsi une distance qui permet à la fois l'identification et l'empathie, ceci pour mieux parler de la solitude, des liens sociaux en milieu rural, de l'hypocrisie, du rapport à la beauté et des paradoxes liés au comportement amoureux ou sexuel.

Engageant une course poursuite (presque étrangement romantique sur le fond) entre l'homme et son amant, qui tente de le géolocaliser grâce à Grindr, "Jours de France" fait ainsi la part belle aux numéros d'acteurs, avec des personnages révélateurs d'une tolérance ou au contraire d'a priori bien ancrés (Fabienne Babe, en amicale chanteuse de maison de retraite, Jean Christophe Bouvet en commerçant qui fait de l'anonymat et de la découverte un principe de vie, tout le reste étant de trop, ou encore Marie France, transexuelle mythique qui joue ici les personnages refuges...).

Toujours tourné vers la comédie, le long métrage parvient tout de même à la fois à toucher et à surprendre, ceci en quasi permanence. Une vraie belle découverte, qui livre au passage quelques petits pics au cinéma français (des séances courues pour draguer car avec peu de public), et quelques vérités sur le fait qu' « on ne court pas après les gens » « c'est dégradant pour eux, humiliant pour soi ». On attend donc avec attention la suite des prochains pas de Jérôme Reybaud.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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