CERTAINES FEMMES
Austère… Oh, se taire !
Kelly Reichardt n’est pas ce qu’on appelle une boute-en-train ! La réalisatrice poursuit son exploration cinématographique des régions rurales et forestières du Nord-Ouest des États-Unis, cette fois dans le Montana après avoir consacré quatre films à l’Oregon : "Old Joy", "Wendy et Lucy", "La Dernière Piste" et "Night Moves". Développant un cinéma austère et taiseux, la réalisatrice s’attache à brosser des portraits féminins minimalistes où presque tout est dans le non-dit et le langage non verbal. Le style colle aux territoires filmés, si rudes et isolés que les caractères paraissent inéluctablement forgés par un certain déterminisme géographique.
Les quatre personnages (et surtout trois car celui de Kristen Stewart est finalement un personnage secondaire rattaché à celui de Lily Gladstone) sont construits avec pudeur et interprétés avec finesse. Un minuscule fil les relie, à tel point que l’on a plutôt l’impression de regarder un enchaînement de trois moyens métrages (ce qui n'est pas étonnant puisqu'il s'agit d'une adaptation de trois nouvelles différentes de l'écrivaine Maile Meloy). Ainsi, malgré toute la beauté et la richesse de ces protagonistes, le film déçoit par sa structure et l’ennui gagne inexorablement – à tel point que l’on peut se demander s’il n’y a pas une intention de nous faire profondément ressentir ce que vivent ces femmes. À la fin, même les spectateurs les plus patients, qui apprécient la contemplation et les fins ouvertes, peuvent se sentir frustrés de ne pas creuser un peu plus la vie de ces quatre femmes et de ne pas avoir plus de connexions entre elles, ne serait-ce que par un choix de montage moins linéaire.
Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur