CONTRACORRIENTE
Le garder auprès de soi
Voici donc le fameux petit film péruvien qui fait parler de lui depuis plus d'un an et sa présentation au Festival de San Sebastian 2009. Depuis, il y a eu surtout le Prix du public au Festival de Sundance 2010. Un gage, a priori de qualité. Par la simplicité du lieu, village de pêcheurs bénéficiant d'une grande ouverture sur l'océan, le film respire d'emblée la liberté. La lumière incroyable, magnifiée par la beauté de la photographie, contraste avec la simplicité des intérieurs, signe des vies humbles de pécheurs, qui n'ont comme ressource que la mer, et la foi pour perspective. Au milieu de cela, un couple homosexuel s'est formé, basé sur une complicité lisible et une affection que les corps à demi-nus, bercés par la chaleur ambiante, transforment en des contacts socialement interdits.
Certes la parabole sur le fait de faire son « coming out », d'assumer l'amour que l'on porte à quelqu'un, est évidente à la vision de la seconde partie du film. Le plus frileux des deux peut alors s'afficher en public, goûter au bonheur de se balader à deux en se tenant la main, fantasme impossible à réaliser auparavant, et rêve pour lui d'une vie avec son amant voire d'une séparation, qu'il n'a cependant aucune envie d'infliger à sa femme, qui le vivrait, elle, comme un cauchemar. Mais derrière cette histoire peu ordinaire de fantôme, à laquelle on aime à croire tant le duo d'acteurs fonctionne, c'est avant tout de savoir lâcher prise qu'il s'agit. Chacun des personnages a sa logique, et l'on comprend parfaitement l'hésitation que peut avoir le survivant, à retrouver le corps de l'autre et risquer de le perdre à jamais. En bref, « Contracorriente » est un drame fantastique, véritable tire larme, au casting impeccable, et dont la sincérité est perceptible à chaque instant.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur