WONDERFULL TOWN
Une fable belle et cruelle de l’ère post-Tsunami
Avec ce premier film, Aditya Assarat pose un regard inhabituel sur les ravages du Tsunami. Au lieu de s’attacher à décrire l’impuissance de l’homme face aux forces dévastatrices de la nature, il se penche sur les conséquences psychologiques et sociales causées par la catastrophe. Ainsi, Takua Pa est l’une de ces petites villes sérieusement touchées qui se sont reconstruites en surface, mais dont la population demeure perdue à jamais. Cette tristesse, liée à l’amertume des hommes et à l’austérité économique qui s’en est suivie, crée l’atmosphère étrange dans laquelle baigne « Wondeful town ». Par un rythme lent et une photographie soignée, Assarat redéfinit le vide et le silence. Il réussit admirablement à retranscrire la moiteur du climat, cette chaleur écrasante qui fige les lieux et crée une tension dramatique presque dérangeante.
Au milieu de ce néant, l’idylle de Na et Ton grandit et irradie la ville telle une fleur poussant parmi les décombres. Des scènes telles que la promenade en moto ou la sieste amoureuse en pleine nature frisent la béatitude, rappelant d’ailleurs certains passages du film « Blissfully yours » d’Apichatpong Weerasethakul (lui aussi thaïlandais). Aussi, malgré tous leurs efforts pour cacher leur relation, Na et Ton ne parviennent pas à taire l’extase qui se lit sur leur visage. Ils deviennent alors la proie des villageois, dont la morne existence ne semble trouver de sens que dans la quête d’un nouvel ennemi post-Tsunami. La cruauté humaine l’emportera. « Wonderful town » est en fait l’histoire d’hommes qui ont tout perdu et que le malheur a rendu définitivement hermétiques au bonheur.
Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur