X-MEN: DAYS OF FUTURE PAST
American History X(-Men)
Dans un futur où les espèces humaine et mutante ont été décimées par les impitoyables robots Sentinelles, les ultimes survivants n’ont plus grand chose à espérer de l’avenir. Dans un ultime effort pour changer le cours tragique des événements, le professeur Xavier et Magnéto envoient Wolverine dans le passé, en 1973, à la rencontre des jeunes mutants écorchés qu’ils ont été. Car le meilleur moyen d’arrêter la guerre reste encore de ne pas la laisser éclater…
Ouah ! Quel film ! Il était évident qu’en reprenant les rênes de la franchise mutante, et en s’inspirant librement d’un double-épisode culte du duo Chris Claremont/John Byrne, Bryan Singer se devait de revenir à un niveau de qualité équivalent à ses excellents deux premiers épisodes. Mais on était loin d’imaginer qu’il puisse livrer un film aussi incroyable, à la fois idéal de blockbuster hollywoodien et vrai nouvel addendum d’une saga à la cohérence qui laisse pantois. Si l’on oublie en effet les très embarrassants "X-Men : L’affrontement final" et "X-Men Origins: Wolverine", difficile de trouver beaucoup à redire à une série de sept (!) films aussi exigeante en matière d’écriture que de fun pur. En revenant à la réalisation de ce nouvel opus, trois ans après le très bon "X-Men : Le commencement" (réalisé par Matthew Vaughn, ici co-scénariste et producteur), Bryan Singer signe donc non seulement le meilleur épisode des aventures des élèves du professeur Xavier, mais également un vrai film de supers-héros émouvant, drôle, et carrément virtuose.
Virtuosité. Le mot est lâché. Virtuosité dans l’écriture, virtuosité dans la direction des acteurs, virtuosité dans l’utilisation de la 3D et des effets numériques, virtuosité, enfin, dans la gestion de ses thématiques et enjeux. Dès les premières images, le ton est donné : dans un futur incertain aux cieux perpétuellement assombris, alors que la caméra parcours des monceaux de cadavres entassés en charniers à ciel ouvert, on découvre les derniers mutants encore en vie, pourchassés par les Sentinelles, de terrifiants robots géants chargés de les exécuter. Le seul espoir des X-Men réside dans l’envoi de Wolverine dans les années 70, avant que la métamorphe Mystique ne commette l’irréparable et plonge le monde dans le chaos. En choisissant la décennie des 70’s (encore sous le traumatisme de l’assassinat de JFK, dix ans plus tôt, et de la guerre du Vietnam) comme contexte historique principal, Singer, à l’instar du film de Vaughn (qui se déroulait durant la crise des missiles de Cuba), inscrit son intrigue dans une « réalité » accentuant la parabole politique et sociale véhiculée par ses personnages, qui deviennent ici de véritables rebelles au gouvernement de Nixon et à sa politique réactionnaire. Jadis symboles de la minorité persécutée (dans le premier "X-Men"), les mutants sont ici les seuls espoirs de l’humanité, véritables supers-héros en devenir.
Mais qui sont-ils, ces mutants en charge du destin de tout un monde ? Si Wolverine (Hugh Jackman, égal à lui-même) est le lien narratif des différentes intrigues et époques, il est étonnamment relégué au second plan lors des passages les plus spectaculaires du film, les vrais héros du film étant le trio formé par Charles Xavier, Magnéto et Mystique. Cette dernière est sans doute le plus beau personnage du film, parfaitement incarné par l’excellente Jennifer Lawrence, et qui cristallise tous les enjeux politiques du récit. Les deux autres, fiévreusement interprétés par James McAvoy (incroyable de fébrilité et de sensibilité) et Michael Fassbender (impérial, à l’image de son discours final), donnent toute la dynamique émotionnelle de cette « entrequelle » (comme l'a appelé son réalisateur), leur relation de haine/amitié et leur violente discordance de point de vue trouvant leur résolution et leur aboutissement lors des ultimes scènes situées dans le futur (Patrick Stewart et Ian McKellen rempilent). Autour de ces quatre protagonistes forts, c’est tout la « famille » habituelle de mutants qui gravite (Le Fauve dans le « présent », Tornade, Kitty Pride ou Colossus dans le futur), vite rejoints par plein de petits nouveaux apportant un peu de fraîcheur à cette colossale réunion de pouvoirs.
Bon, un scénario exemplaire (voir comment des éléments de tous les autres films de la saga sont intégrés à l’histoire), des acteurs épatants (dont le nabot Peter Dinklage, génial) et des personnages forts, c’est très bien, me direz-vous. Mais qu’en est-il des passages les plus attendus, et par extension, les plus spectaculaires ? Et bien, là encore, le plaisir est total. De la tétanisante séquence d’introduction, montrant une équipe soudée aux talents complémentaires (la mutante Blink créant des failles spatio-temporelles pour que ses équipiers virevoltent autour des Sentinelles et échappent à leur courroux), à son double climax mégalo (Magnéto fait léviter un stade pour en encercler la Maison Blanche, alors que dans le futur, les X-Men affrontent les Sentinelles dans une ultime bataille, le tout monté en parallèle), toutes les séquences d’action du film donnent le tournis, et le sourire, tant elles semblent s’intégrer parfaitement à la narration tout en délivrant le quota de spectaculaire. Avec, qui débarque alors qu’on ne l’attendait absolument pas, LA scène le plus géniale entrevue dans un blockbuster de SF depuis bien longtemps, et qui voit le bolide Pietro Maximoff utiliser ses pouvoirs (il se déplace très vite) en participant à l’évasion de Magnéto. Un pur moment de fun, utilisant les possibilités de la 3D (native !) avec un vrai goût pour l’expérimentation jouissive et l’humour bon enfant, que Singer emballe avec l’assurance des plus grands.
Dire qu’on n’attendait pas un excellent film serait mentir. Mais dire qu’on n’attendait pas un film aussi fabuleux serait la vérité. Car en se donnant les moyens de ses ambitions, en ne reculant devant aucune idée, aussi folle soit-elle, et en se permettant de donner à son film de super-héros le supplément d’âme qui manque cruellement au genre, Bryan Singer fait honneur à ses étranges X-Men, à l’image de son casse-gueule, et miraculeux, final, qui impose, du moins pour un temps, un statu quo émouvant et sublimement optimiste, à l’histoire complexe des mutants. C’est dire si on attend la suite !
Frederic WullschlegerEnvoyer un message au rédacteurBANDE ANNONCE