THE VOICES
Mi-ange mi-démon, Ryan Reynolds fait des merveilles dans cette comédie horrifique déjantée
Décidément Marjane Satrapi aime brouiller les pistes. Après son film d’animation "Persepolis", co-réalisé avec Vincent Paronnaud, la cinéaste franco-iranienne s’était lancée dans l’adaptation de son conte dépressif "Poulet aux prunes" puis dans le film d’auteur avec "La Bande des Jotas". Elle change à nouveau de genre et se plonge cette fois-ci dans la comédie horrifique avec une production américano-germanique, "The Voices", petite bombe qui a fait le bonheur du festival de Gérardmer cette année d’où il est reparti avec un prix du jury (partagé avec "Ex Machina") et un prix du public !
On savait Ryan Reynolds inquiétant depuis un de ses premiers grands rôles dans le remake d’"Amityville", il le confirme ici dans le rôle de Jerry un psychopathe bien différent qui lui permet de jouer sur deux tableaux : le cool-guy limite benêt et le monstre sanguinaire mais qui l’a pas fait exprès ! Pour personnifier ses deux natures ambivalentes, Michael R. Perry (le scénariste) imagine que Jerry parle avec son chat (M. Moustache) et son chien (Bosco) à qui d’ailleurs Ryan Reynolds prête sa voix dans la version originale. Le petit ange et le petit démon se transforment donc ici en animaux de compagnie, avec dans le rôle de la bonne parole Bosco, et dans celui de la tentation perfide M. Moustache !
Car ses « voix » auxquelles fait référence le titre du film, ce sont donc celles inattendues de ces bêtes à poils, qui sortent tout droit de l’imagination de leur maître et qui nous permettent d’entrer dans la tête de ce dernier pour comprendre chacun de ses doutes sentimentaux, chacune de ses tensions intérieures et tous ses questionnements existentiels. Mais ces voix, ce sont aussi bientôt celles de ses victimes, quand le sympathique mais psychotique Jerry va accumuler les homicides plus ou moins involontaires !
L’histoire alterne alors moments de comédie pure et scènes joyeusement gores, dans un savant dosage parfaitement maîtrisé par Marjane Satrapi. Ryan Reynolds est excellent en serial killer à qui on donnerait le bon Dieu sans confession surtout lorsqu’il oublie volontairement de prendre ses médicaments pour ne pas voir la réalité en face et rester dans son monde peuplé de têtes animées, d’un chien raisonnable et d’un « psychocat » loufoque qui l’emmène vers ses penchants les plus inavouables ! On rit donc plus qu’on ne frissonne grâce à un film coloré, enjoué, chorégraphié et dialogué aux petits oignons, faisant de "The Voices", une comédie familiale de genre génialement déjantée ! De quoi nous faire oublier les quelques baisses de régime souvent comblées par une relance qui vous remet aussitôt en selle.
Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur