SLICE
Surprenant
Dans la ville de Bangkok, un mystérieux tueur en série vêtu intégralement de rouge sévit en laissant ses victimes à l’intérieur de grosses valises rouges. Ses proies de prédilections sont celles s’adonnant à la prostitution. La police piétine mais entend parler d’un détenu, nommé Thaï, affirmant connaître l’identité de l’assassin. Poussée par un ministre dont le fils vient d’être la victime du tueur en série, l’inspecteur Chun décide d’engager Thaï pour retrouver les traces du meurtrier…
Sous ses faux airs d’ersatz cheap de "Seven", ce polar thaïlandais ne démarre pas sous les meilleurs augures. Les premières minutes ne payent pas de mine et sont en plus outrancièrement bourrée d'effets de styles bien malvenus. L’intrigue, poussive et alambiquée de prime à bord, laisse présager un slasher déguisé en polar urbain bas de gamme. Finalement, contre toutes attentes, une fois Taï engagé, le film bascule. De la ville fourmillante de Bangkok on passe à la campagne, de séquences de massacres au ralenti la réalisation devient minimaliste, et du polar on passe au drame.
Sur les traces de son ami d’enfance, Nut, qu’il soupçonne d’être l’auteur des crimes perpétués à la ville, Taï revient sur les lieux de son enfance et se remémore les instants passés avec celui-ci. Car l’un des inspecteurs en est certain, et il a d’ailleurs trouvé ça tout seul, les crimes de Nut sont un message destiné à Taï. Grâce à cette arbitraire mais judicieuse assertion, nous avons droit à de captivantes séquences entre enfants qui sont par ailleurs, infiniment plus convaincants que les adultes du film. Ce sont ces souvenirs qui vont constituer l’intérêt majeur du film et Kongkiat Khomsiri a l’intelligence de troquer l’ennuyeux présent contre le passionnant passé pendant les deux tiers du film.
Le réalisateur n'hésite d’ailleurs pas à dénoncer les pratiques pédophiles et incestueuses de nombreux autochtones de Thaïlande, pays gangréné par l'esclavage sexuel. Ce que l’on pouvait d’ailleurs percevoir dans la mise place, mais qui restait vain car esthétisé à outrance, prend, dans les flashbacks une toute autre dimension grâce au destin de Nut, pour qui on se surprend à éprouver de l’empathie. Dans cette partie, le réalisateur évite brillamment le voyeurisme déplacé que l’on pouvait lui reprocher dans la première. Enfin, la troisième partie vient encore relever le niveau avec un retournement de situation inattendu et parfaitement amené grâce à un judicieux montage au millimètre. "Slice" se clôt au final sans fausse note, à contrepied de ce qu’il avait annoncé et c’est une très bonne surprise.
Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur