EVERYBODY WANTS SOME !!
Tout le monde en veut plus !!
En 1993, sortait une comédie sur des lycéens dans leur dernier jour de classe. "Dazed and confused" ("Génération Rebelle" dans la langue de Molière) était nommé de la sorte en référence à une chanson de Led Zeppelin, et permettait de découvrir une belle brochette de jeunes acteurs en devenir (Matthew McConaughey, Adam Goldberg, Milla Jovovich, Ben Affleck ou encore Parker Posey). En 2016, débarque sur les écrans "Everybody wants some !!", titre d’une chanson de Van Halen sur les désirs sexuels primaires des adolescents, avec de nombreux comédiens prometteurs. De là à prédire à cette troupe de quasi-inconnus un destin semblable à leurs aînés, il n’y a qu’un pas. Car dans cette monture version 2016, les similitudes se retrouvent également au cœur du métrage, le film se construisant comme une suite spirituelle à son prédécesseur. Et pour renforcer cette filiation, Richard Linklater a cette fois décidé de traiter les trois jours précédant la première rentrée à l’université. Comme si un simple été séparait ces deux projets.
Mais plus que cet héritage, on retrouve dans cette comédie désinvolte et totalement kitsch toutes les obsessions du cinéaste, ce désir insatiable de capturer les émois de ses personnages pour les ériger en miroir d’une génération, ce sens aiguisé du verbe dissimulé derrière une fausse simplicité du discours, cet effacement de la caméra pour brouiller les pistes et les barrières entre fiction et documentaire, et cette propension à laisser suspensifs les épilogues de ses récits pour mieux tourmenter les songes des spectateurs. L’histoire de Jake, lauréat d’une bourse d’études pour rejoindre une équipe universitaire de base-ball, n’est ainsi qu’un prétexte pour dresser le portrait nostalgique et bienveillant d’une bande de mâles en rut, prêts à tout pour obtenir les faveurs de la gente féminine. Si le film reprend tous les codes du teen movie, des soirées arrosées aux jeunes filles dénudées en passant par les blagues bien lourdes, "Everybody wants some !!" se distingue de ses contemporains par son charme irrésistible et son ton décalé.
Situer son film dans les années 80 ne suffit pas à saisir l’atmosphère si particulière de cette époque où le mini-short était de rigueur pour les deux sexes. Le metteur en scène le sait, et c’est pourquoi chaque recoin de son image transpire les eighties qu’il recouvre d’un doux manteau ironique, s’amusant avec l’homo-érotisme de ce milieu sportif à la virilité exacerbée. Souffrant de certaines longueurs, cet hommage groovy aux fantasmes adolescents bénéficie néanmoins d’une énergie communicative, d’un humour percutant, et d’une bande-son léchée. Développant une singularité intelligente et un environnement envoûtant tout en s’imbriquant parfaitement dans la filmographie de Linklater, "Everybody wants some !!" est un objet à part, une étude sociologique loufoque, une œuvre générationnelle dont l’absence d’évolution est comblée par une ambiance profondément captivante. Le réalisateur nous a conviés à découvrir ses souvenirs chimériques de jeunesse. Le voyage est un poil redondant mais totalement jouissif !
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur