LES VISITEURS : LA RÉVOLUTION
CONTRE : Niveau -3 - Davantage une Terreur qu’une Révolution…
Ils sont revenus, les malades ! Alors, contents ? Euh… Bon, honnêtement, on s’y attendait. Entre un blocus imposé par la Gaumont (pas de projo presse ni d’avant-première), un sous-titre changé à la dernière minute (« La Terreur » est devenu « La Révolution » : le premier était pourtant plus logique par rapport à ce qu’est finalement le film !) et une bande-annonce atroce, le naufrage était à prévoir. Mais ce troisième épisode des "Visiteurs" a malgré tout le mérite de nous pousser à l’interrogation : aimer le premier film (et, dans une moindre mesure, le second) et rejeter en bloc celui-ci relève-t-il d’une anomalie ? En fait, un début de réponse se trouve déjà dans le parcours de Jean-Marie Poiré, dont l’interminable absence de quatorze ans n’aura pourtant pas réussi à nous faire oublier le souvenir nauséeux de "Ma femme… s’appelle Maurice". Un cinéaste à la carrière placée sous le signe du culte, mais qui, à la suite du carton des "Visiteurs" en 1993, aura pris une bien mauvaise route.
Le début des "Visiteurs 3" nous ramène instantanément à la sortie des "Anges Gardiens" en 1995. Soit un film où le réalisateur, comme pris soudainement d’une hystérie carabinée en pleine salle de montage, s’acharne à charcuter son film à la manière d’un Lego monté à la va-vite. Le résultat est alors édifiant : des plans d’une laideur folle, filmés dans un grand angle jamais canalisé et limités à deux secondes chacun. Et quand un film cherche à aller plus vite que la pensée du spectateur, celui-ci peut vite avoir l’impression de se faire violenter. Telle est la situation dans laquelle nous place le premier quart d’heure – voire même la totalité – des "Visiteurs 3", où la narration s’avère si pressée et le découpage si illisible qu’on en arrive à ne plus rien y comprendre. En même temps, l’envie n’était pas non plus au rendez-vous devant un scénario qui, à bien y regarder, présente un curieux décalage avec la fin de son prédécesseur : en effet, là où l’opus n°2 s’achevait sur nos deux héros rencontrant le général Bonaparte (ce qui doit situer l’action du film après l’an 1800 environ), voilà que cet opus n°3 nous les montre en pleine Terreur naissante (soit presque douze ans auparavant). Un détail, certes, mais qui révèle hélas le gros bazar narratif dans lequel se sont englués Poiré et Clavier.
Le choix de la Révolution Française était pourtant une idée intéressante à la base : une inversion des rôles entre Godefroy et Jacquouille (le premier est persécuté, le second est célébré) et des situations qui pouvaient chatouiller la satire en piochant dans le conflit aristocrate/révolutionnaire. Sauf que le film ne traite jamais cela : on passe littéralement deux heures dans des appartements fermés à entendre sans cesse des dialogues vulgaires (il est rare d’entendre « chier » et « crotte » aussi souvent dans un film !) et à « savourer » des gags qui tournent à 95% autour du manque d’hygiène. Le délire scato et pipi-caca faisait rire dans les "Visiteurs" par le soin apporté à l’écriture des situations et la belle tenue de la mise en scène, mais là, un tel manque d’idées a de quoi atterrer. On ne rigole jamais, on ne dégaine même pas un sourire, et au bout d’une demi-heure, on a déjà envie de quitter la salle. Non pas parce qu’on se serait trop habitué à ces deux zigotos, mais parce que chaque enjeu a été recouvert d’une grosse couche de grossièreté.
Entouré d’un casting de pointures comiques qui n’ont pas grand-chose à jouer (on saluera néanmoins un Franck Dubosc décidément très bon lorsqu’il opte pour un humour premier degré), Jean Reno et Christian Clavier sont aussi pour beaucoup dans l’ampleur du désastre. Le premier n’est plus ce que l’on peut appeler un « acteur » : ses deux expressions faciales n’expriment plus rien, et son personnage n’a ici qu’une fonction de suiveur mutique. Quant au second, on est à deux doigts de croire à un vrai hara-kiri carriériste à force de le voir pousser son rôle de Jacquouille vers un degré d’hystérie aussi irritant. Les deux ne font ici qu’acte de présence, beuglant comme de vieux zombies et dépourvus du moindre enjeu dramatique. Tout se traîne lamentablement, et ce jusqu’à un final hautement crétin qui les expédie cette fois-ci en pleine Seconde Guerre Mondiale afin de mieux préparer un quatrième opus… Pas okkkay du tout, ça…
Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur