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BLIND MASSAGE

Un film de Lou Ye

Immersion inégale dans l'intimité des aveugles

Un enfant ayant perdu la vue en même temps que sa mère lors d’un accident de voiture, découvre plus tard qu’on lui ment et qu’il ne retrouvera jamais la vue. Fatigué, il décide de se trancher la gorge. Ayant finalement survécu, on le retrouve devenu maître du massage à l’aveugle, le Tui Na, dont les salons fleurissent…

Le nouveau film de Lou Ye ("Mystery", "Nuits d'ivresses printanières"), découvert en compétition au Festival de Berlin 2014, se concentre sur les relations intimes d'un groupe d'aveugles ou mal-voyants travaillant dans un salon de massages réputé. Tout en adoptant une posture très sensorielle, l'auteur tente d'adapter son style, dominé par la caméra à l'épaule, pour mieux figurer les corps qui se frôlent et s'évitent, et l'incertitude des mouvements de ses protagonistes.

Utilisant de nombreux plans partiellement flous, pour mieux signifier la cécité de son personnage principal, Lou Ye essaye de faire rentrer en résonance les sentiments des adultes qu'il filme, avec l'absence de perspective de leur vision comme de leur avenir. Décrivant un monde rassurant au début, devenant plus rude par la suite, il aborde la difficulté des relations intimes, dans un milieu où le voyant est considéré comme « l'espèce dominante ».

En abordant cette communauté de l'intérieur, ses membres étant voués à une certaine promiscuité, le réalisateur fait du spectateur le témoin mal à l'aise d'expressions de non-dits ou de gestes, parfois très intimes. Plus conscient des enjeux personnels qui se nouent, ce dernier a toujours une longueur d'avance sur des personnages ainsi ressentis comme encore plus vulnérables. Il se dégage alors du film, traitant principalement de l'espoir, une sensation étrange de voyeurisme, rien ne pouvant nous être caché, à la limite du supportable.

"Blind Massage" étale ainsi les amours contrariés, la tentative insistante de séduction d'une femme, l'attachement à un homme aveugle alors qu'on perd progressivement soi-même la vue... Des situations diverses (voir la parabole sur la collision entre êtres et voitures) dans lesquelles la question de la beauté physique hante les âmes, tout comme celle de l'existence des choses que l'on ne peut pas voir. Inégal, malgré une charge dramatique importante, le film a du mal à émouvoir et n'évite pas quelques longueurs.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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